10 activités étranges et inhabituelles à Venise

Acqua Altadi Venezia est une librairie et une attraction touristique. Pour vous y rendre, il vous faudra sortir des sentiers battus et vous rendre juste au-delà de la belle église Santa Maria Formosa. Au fur et à mesure que le niveau d’eau de la lagune monte, le canal s’engouffre dans la librairie. Le propriétaire a résolu le problème en remplissant sa boutique de meubles flottants ou résistant à l’eau. Votre livre pourrait être dans la gondole à l’entrée, un vieux bateau ou une baignoire. En fait, les livres eux-mêmes font partie de l’architecture : dans la cour, on monte un escalier fait de vieux volumes pour regarder par-dessus le mur qui surplombe un canal. N’hésitez pas à vous procurer un livre pour rapporter chez vous un bout de ce monde étrange et génial.

Située dans la lagune de Venise, l’île Saint-Lazare des Arméniens capture l’esprit cosmopolite d’une ville enrichie par le commerce avec des mondes lointains. Elle se trouve près de la côte ouest du Lido. Depuis le XVIIIe siècle, elle est le centre spirituel d’une communauté monastique arménienne, qui élut domicile sur cette île abandonnée avec un monastère en ruine. Ils rénovèrent l’église, construisirent des bâtiments, quadruplèrent la superficie de l’île et fondèrent une imprimerie, produisant des ouvrages littéraires, scientifiques et religieux en 36 langues et 10 alphabets. On y trouve aussi une collection de plus de 4 000 manuscrits arméniens, une galerie d’art et un musée contenant des œuvres et objets arabes ainsi qu’une momie égyptienne. Vous pouvez vous y rendre en prenant le vaporetto jusqu’à San Zaccaria, le long du front de mer Riva degli Schiavoni.

Ne vous laissez pas berner par la façade austère et inachevée de l’église de San Pantalon, près du Campo Santa Margherita. À l’intérieur, 443 mètres carrés de voûtes sont ornés d’une œuvre qui ressemble à une fresque spectaculaire, mais est en fait une énorme toile peinte, la plus grande du monde selon les habitants. Réalisée par l’assemblage de 40 toiles, elle vous fera tordre le cou pour admirer la représentation du martyr saint Pantaléon. Une astuce de perspective fait paraître l’église plus grande, l’architecture étant complétée par des colonnes et arcs peints. Cette tâche colossale fut confiée à Giovanni Antonio Fumiani, qui était spécialisé dans la scénographie. La narration figurative commence avec l’empereur Galère sur le trône, puis vient sa condamnation, la torture, l’exécution et, au centre, l’ascension au ciel.

Un voyage au cimetière San Michele est un bon prétexte pour se balader en vaporetto. La lagune contient plusieurs îles, mais celle de San Michele est tout à fait singulière : il s’agit d’un cimetière de la ville, qui accueille toutefois aussi la dépouille d’étrangers, comme le compositeur Igor Stravinsky, le poète Ezra Pound ou l’imprésario de ballet russe Sergej Diaghilev. Autrefois, les enterrements avaient lieu à côté des églises, et des personnalités bien connues y ont trouvé leur dernière demeure. À l’époque napoléonienne, les cimetières étaient interdits dans les zones habitées pour des raisons d’hygiène. Ainsi, les Vénitiens ont plutôt utilisé l’île San Michele, en dehors de la ville mais facilement accessible. Jusqu’au milieu du XXe siècle, un pont flottant était mis en place pour faciliter les visites chaque 1er novembre. Le ponton est près d’une entrée latérale à côté de l’église, le meilleur endroit pour commencer votre voyage.

Le Lazzaretto Nuovo et le Lazzaretto Vecchio ont été fondés lorsque Venise était la plaque tournante du commerce entre l’Orient et l’Occident. Le trafic apportait des richesses, mais risquait aussi de transmettre des maladies. À la fin du XVe siècle, les Vénitiens ont eu une idée novatrice imitée par la suite dans le monde entier : ils ont désigné deux îles pour stocker et contrôler les marchandises suspectes et pour s’occuper des passagers infectés. Ainsi sont nés les deux Lazzaretti (lazarets). Le Lazzaretto Nuovo, le long du Canale di Sant’Erasmo (canal de Sant’Erasmo), était destiné à surveiller les personnes et les biens. La visite comprend une exposition dans les bâtiments et sur le site archéologique, mais un sentier nature invite également à la promenade autour des murs. Le Lazzaretto Vecchio, près de la côte du Lido, était utilisé pour soigner les personnes infectées. L’île propose des horaires de visites spéciales le dimanche, mais vous pouvez également réserver une visite guidée.

Une visite du Museo del Manicomio (musée de l’asile psychiatrique), sur l’île de Servolo, peut faire frissonner, mais c’est une expérience culturelle, historique et naturaliste captivante. Dans un magnifique parc sur l’île de San Servolo se dresse un ancien monastère, qui a ensuite été utilisé comme hôpital, d’abord pour les soldats blessés, puis pour les handicapés mentaux. L’exposition La follia reclusa (folie recluse) retrace l’histoire scientifique et les histoires personnelles du lieu, avec des documents, des dossiers médicaux, des peintures et des objets créés par des patients, du matériel de contention pour les bras et les chevilles, des photos de la vie dans les chambres, le piano utilisé dans la musicothérapie et des outils d’électrochocs. Vous trouverez également une salle d’anatomie et une pharmacie du XVIIIe siècle présentant plus de 200 récipients différents sur les étagères d’origine.

La crypte inondée de San Zaccaria, près de la place Saint-Marc, se trouve dans l’une des plus belles églises de Venise, qui séduit par sa façade du XVe siècle, l’art exquis de ses intérieurs et bien d’autres trésors. Depuis la chapelle San Tarasio, dans l’une des absides, vous pourrez descendre les marches menant à la crypte ; il s’agit de l’une des caractéristiques les plus impressionnantes de l’édifice, mais elle est facilement manquée par les touristes distraits. Elle est divisée en trois nefs, avec des colonnes et des voûtes croisées. Les premiers doges de la sérénissime république de Venise y sont enterrés. De nos jours, comme dans de nombreux édifices vénitiens, la zone souterraine est constamment inondée, et l’eau l’a transformée en un espace singulier et fascinant. Le reflet des colonnes et des voûtes semble doubler l’espace, créant une impression de profondeur et des perspectives nouvelles.

Le labyrinthe Borges n’est pas le dédale de rues et de canaux, mais un véritable parcours complexe entouré de haies. Créé sur l’île de San Giorgio Maggiore, il est dédié à Jorge Luis Borges, qui avait des liens étroits avec Venise. La ville a voulu lui rendre hommage avec ce monument. La structure insolite est liée à l’œuvre de l’écrivain argentin éponyme : les labyrinthes sont un thème récurrent chez lui, symbolisant la complexité du monde et la difficulté de l’homme à trouver sa voie. Le labyrinthe est à un court trajet en vaporetto de la place Saint-Marc. En descendant, il vous suffira de contourner la basilique pour rejoindre votre destination. Le parcours est impressionnant à regarder : long de presque 1 kilomètre, il est formé de plus de 3 000 buis.

En vous rendant au tombeau d’Antonio Canova, vous aurez un aperçu du symbolisme maçonnique et découvrirez un langage énigmatique et allégorique sur l’architecture et les monuments environnants. Ce tombeau se trouve dans la basilique Santa Maria Gloriosa dei Frari, près du Campo San Polo. La forme même de la structure est étrange, d’autant plus qu’elle est située dans une église : il s’agit d’une pyramide représentant le Grand Architecte de l’Univers, la divinité des francs-maçons. Vous aimeriez déchiffrer les codes secrets sur les statues ? Il y a un ange déployant ses ailes, un lion endormi avec un livre entre ses pattes, un jeune tenant une torche, une femme voilée et d’autres personnages. L’histoire qu’ils racontent a trait à l’immortalité de l’âme, à la sagesse d’un artiste et à son inspiration. Pour ajouter au mystère, la tombe ne contient que le cœur de Canova : son corps se trouve dans sa ville natale, Possagno.

Derrière le maître-autel de la basilique Sainte-Marie-et-Saint-Donat, sur l’île de Murano, vous verrez les énormes côtes de dragon. Selon la légende, ces os (probablement ceux d’une baleine) viendraient en effet d’une créature terrifiante vaincue par saint Donat. L’histoire remonte au XIIe siècle, lorsque les restes du saint ont été transférés à l’église. Des miracles lui ont été attribués, comme le fait d’avoir tué un monstre avec le signe de la croix au combat. Peu de temps après l’arrivée du corps, les ossements d’animaux ont également été apportés à l’église. Ils sont toujours exposés, mais sont quelque peu dissimulés parmi les mosaïques et les œuvres d’art. Essayez de vous mettre à la place d’un vénitien médiéval ; peut-être apercevrez-vous encore un dragon.